Histoire De La Céramique Crétoise

AU Xe AU XXe SIÈCLE

Deuxième période byzantine (961-1204)

Fort peu de fouilles archéologiques couvrant cette période ont été effectuées dans la campagne crétoise et, en général, elles sont d’une envergure très limitée. On suppose que, entre 800 et 961, le profond déclin économique de la grande île et l’Occupation arabe ont fait chuter la production : la céramique, elle aussi, a été touchée par ce marasme. De cette période sont datés des objets aux parois épaisses, sans le moindre décor ni verni, polies sur l’argile fraîche au moyen d’un galet. Des tessons de vase nous permettent de conclure que l’on continue de fabriquer les formes simplifiées de la première période byzantine, qui remontent elles-mêmes à l’antiquité.

Du Xe au XIIe s., la céramique qui s’observe en province est de production locale, semblable à celle des siècles précédents, tandis que l’on rencontre de plus en plus souvent une poterie vitrifiée importée de Byzance et ornée du décor caractéristique de l’époque. Au XIIe s., les vases crétois en biscuit se font plus raffinés et imitent parfois les modèles égéens et pélasgiques alors largement diffusés dans l’empire byzantin. Parallèlement font leur apparition des vases très ouverts, à pied épais et court, vitrifiés, monochromes, de couleur brune ou vert foncé, de production locale, qui ont probablement un usage rituel, car leurs tessons se rencontrent aux alentours d’anciennes églises.

Ont été découverts par hasard des récipients provenant d’Égypte et de Libye.

 

Vénétocratie (1205-1645 )

Durant une première période marquée par de violents conflits (1205 – 1300), la production de céramiques diminue ou reste stagnante.

Pendant la deuxième période (1300 – 1460), dont la fin coïncide avec la prise de Constantinople par les Turcs, la poterie locale acquiert une nouvelle vigueur, avec une multiplicité de formes et de décors.

Les petits vases en biscuit commencent à s’orner d’une couleur argileuse qui, en fonction de la cuisson, prend des tons rouges ou marron foncé. Le décor est particulièrement sobre et se compose notamment de lignes parallèles ou de résilles. Les grands récipients en biscuit, tels que jarres, bassines, ruches, vasques etc., se multiplient dans divers formats et pour différents usages, tandis qu’ils commencent à s’orner de motifs gravés ou estampés.

Au cours de cette période fait son apparition, pour prospérer ensuite, une production crétoise vitrifiée d’assiettes (pinakia), de jattes et de carafes notamment, dans de douces et délicates nuances de vert et de jaune, avec quelques points de couleur brune sur un fond d’engobe blanc. Le décor pictural est géométrique, avec des représentations en résille, des spires, des pétales de fleurs etc. Il est créé en incisant légèrement le vase, sur l’engobe et sur la couleur, et prend une teinte foncée après la cuisson. L’ornementation des vases vitrifiés crétois diffère de celle qui se rencontre dans le Péloponnèse, à Chypre et en Asie Mineure.

La troisième période (1460 – 1645) se caractérise, durant une première phase qui va jusqu’en 1550, par un vif essor de la céramique.

Les grandes formes -essentiellement des jarres-, sont fréquemment ornées au moyen d’un rouleau à cachet (ou «mollette») qui crée des bandes de différents motifs décoratifs. Le nombre des formes de récipients vitrifiés augmente, elles se répandent largement dans les provinces, alors que la qualité ne cesse de s’améliorer.

Pendant une deuxième phase (1550 – 1645), le déclin se fait sentir, surtout pour les récipients vitrifiés, avec la simplification, voire la disparition, de tout décor incisé, alors que les couleurs se font plus pâles et recouvrent toute la surface du vase. Cette tendance est très probablement due, après la conquête de Chypre par les Turcs (1570), à l’insécurité diffuse qui règne désormais dans toutes les possessions vénitiennes menacées par l’avancée des Ottomans.

 

L’Occupation Turque (1645-1898 )

Durant une première phase (1645 – 1770), les biscuits à décor d’argile continuent à se rencontrer, mais les vases vitrifiés commencent à devenir plus rares et ne sont maintenant ornés que d’une délicate couleur vert pâle. Parallèlement, sont alors importées de Rhodes des assiettes très caractéristiques, vitrifiées et bicolores. Les grands vases, en particulier les jarres, poursuivent leur apogée en raison de la forte production d’huile qui marque le XVIIIe s. Cependant, ils sont désormais moins décorés.

Au cours de la deuxième phase de la Turcocratie (1770 – 1898), les incessants soulèvements des Crétois contre l’occupant provoquent une profonde instabilité sociale et économique. Il en résulte une forte diminution de la production, désormais limitée au strict nécessaire, et ce dans tous les domaines. Les récipients vitrifiés cessent d’être fabriqués et les autres types de vases subsistent dans leurs formes les plus simples.

 

Le Xxe Siècle, La Libération Et Le Rattachement À La Grèce (1898-2006)

La première période (1898 – 1960) est celle de la renaissance de la céramique traditionnelle. En particulier avec le nouveau redressement de l’économie et la libre circulation des marchandises et de l’argent, les besoins en vases augmentent. Jarres, ruches, pichets, cruches etc. connaissent une grande efflorescence. En revanche, les petits objets vont progressivement se trouver remplacés avec l’apparition de nouveaux matériaux industriels tels que le verre, l’aluminium, le fer. De l’ornementation traditionnelle, subsistent seulement : le motif tracés avec une roue dentée (mollette), l’incision effectuée avec un petit peigne fin, et le décor d’argile très schématisé, uniquement sur les cruches.

La seconde phase (de 1960 à nos jours) coïncide avec les changements radicaux de mode de vie qui succèdent aux années de l’Occupation, dans une Grèce qui n’avait acquis ses frontières d’aujourd’hui qu’en 1910 ! La Crète, de même que les autres régions frontalières, fait son entrée dans la civilisation moderne et matérialiste. En 1960, les potiers ambulants mettent un terme à leurs tournées dans l’île et les petits foyers de céramique périclitent. Les grands centres, comme Thrapsanos et Margaritès, continuent jusqu’en 1980 à produire des objets usuels, tels que pichets, jattes, pots de fleurs, jarres etc. Depuis cette date et jusqu’à présent, ils se livrent à une production massive de vases traditionnels ou non, destinés à des usages «touristiques» ou décoratifs, dont la plus grande partie est exportée vers l’Europe occidentale où les grandes jarres, en particulier, connaissent un grand succès. Les techniques de fabrication demeurent presque les mêmes, ce qui n’est pas le cas des argiles ni de la cuisson au four.